Consultation publique sur la rénovation du chauffage collectif : Contribution de COENOVE

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Dans le cadre de la mission flash sur la réduction des émissions de CO2 des bâtiments chauffés collectivement [1] lancée par l’Assemblée, l’association Coénove contribue par écrit en apportant quelques pistes de travail pragmatiques et aux effets rapides.

1. Deux remarques préalables

  • Si nous sommes persuadés que la rénovation globale et performante des immeubles collectifs est indispensable dans un objectif de neutralité carbone, elle reste(ra) une démarche difficile et semée d’embuches, en particulier en copropriétés. La complexité des travaux, leur coût et leur programmation vont nécessiter une anticipation forte du processus de décision, pas toujours adaptée à l’urgence des objectifs.
  • Coénove reste plus que jamais convaincue qu’il convient d’adopter une démarche pragmatique permettant de réduire rapidement et à moindre coût pour l’usager les consommations d’énergie et les émissions de CO2 correspondantes, particulièrement sur ce marché.

On l’a vu : si la prise de décision est « simple » dans le cas des bailleurs sociaux, il n’en est pas de même des bâtiments en copropriété où les décisions de travaux lourds « non indispensables » sont toujours repoussées à plus tard. En revanche, ce n’est pas le cas lorsqu’il s’agit de rénover une vieille chaudière collective qui menace de tomber en panne.

Qu’elles soient anticipées ou imposées par l’urgence, quelles solutions s’offrent alors aux décideurs ?

  • Mise en place d’une chaudière gaz à Très Haute Performance Énergétique (THPE) [2],
  • Mise en place d’une chaudière gaz THPE couplée à un ballon d’eau chaude collectif thermodynamique (CET) à appoint gaz ou non,
  • Mise en place d’un ballon d’eau chaude collectif thermodynamique à appoint gaz ou non, en complément d’une chaudière gaz THPE déjà en place.

2. Quelques éléments de marché

Les immeubles chauffés collectivement sont, soit raccordés au chauffage urbain, soit équipés la plupart du temps d’une chaudière fioul ou d’une chaudière gaz. Dans ces deux derniers cas, ils ont la particularité de disposer d’un local chaufferie, adapté à la mise en place de nouveaux équipements.

  • Cas du chauffage urbain

Concernant les bâtiments déjà raccordés à un réseau de chauffage urbain (RCU), nous pensons que la seule voie pour réduire les besoins de chauffage est l’isolation du bâti, afin de réduire les émissions et la facture des clients, englobée dans un contrat de performance énergétique (CPE) définissant les coûts et les gains attendus.

Pour les immeubles non raccordés, il est envisageable de les raccorder à un réseau « vert » si présent à proximité du bâtiment avec la mise en place d’une sous station dans l’ancien local chaufferie. Là aussi s’appuyer sur un CPE transparent permettant à chaque utilisateur de connaître le montant de sa future facture. Rappelons que cette solution conduit les clients à une perte totale de liberté de choix ultérieure, puisqu’ils seront condamnés à rester raccordés au réseau de chauffage urbain.

  • Cas du chauffage au fioul

Les données CEREN 2017 évaluent le nombre de logements chauffés à partir d’une chaufferie fioul à 740.000 dont 550.000 occupés au titre de résidence principale et 470.000 situés en zone desservie en gaz. En extrapolant ces données en 2021, ce sont environ 200.000 logements chauffés collectivement au fioul qui sont situés à moins de 35 mètres du réseau de gaz, soit de l’ordre de 10.000 chaufferies fioul qui peuvent donc facilement et rapidement être rénovées à moindre coût, avec des réductions significatives d’émission de GES.

Le remplacement d’une ancienne chaudière fioul par une chaudière gaz THPE permet de diviser par 2 les émissions de GES, par 5 les émissions de NOx et de SO2 et par un facteur de 8 à 10 les émissions de poussières. Pour les 200.000 logements évoqués ci-avant, cela représenterait une réduction d’émission annuelle de plus de 300.000 t CO2, mais aussi une économie d’énergie primaire de 25% bénéficiant directement aux résidents de l’immeuble.

  • Cas du chauffage au gaz

Les données CEREN 2017 évaluent le nombre de logements chauffés collectivement au gaz à 3 millions dont 2 millions avec production associée d’eau chaude sanitaire, soit environ 40.000 chaufferies gaz produisant le chauffage et l’eau chaude sanitaire.

S’il est difficile d’évaluer le nombre de chaudières collectives standard, on peut cependant affirmer que :

  • le remplacement d’une chaudière gaz collective standard par une chaudière gaz collective THPE permet une réduction des consommations d’énergie et d’émissions de GES d’au moins 20%,
  • l’hybridation de l’eau chaude sanitaire d’une chaufferie gaz par la mise en place d’un chauffe-eau thermodynamique collectif permet de réduire d’environ 10 à 20% les émissions de GES de la chaufferie, suivant qu’il soit à appoint gaz ou non.

A ce stade, il est essentiel d’insister sur un atout important des chaudières gaz THPE en rénovation : du fait de leur forte modulation de puissance, il n’y a jamais de problème de dimensionnement, ni d’ordre dans lequel doivent être effectués les travaux, contrairement aux autres technologies pour lesquelles des précautions sont nécessaires pour éviter toute contre-référence et insatisfaction ultérieure des occupants.

Ainsi, il sera toujours possible, ultérieurement à la rénovation de la chaufferie et sans avoir à la changer, de poursuivre la rénovation du bâtiment en procédant à des travaux d’isolation dont les décisions sont toujours longues en copropriété.

Nous sommes convaincus que la meilleure façon, la moins chère, la plus rapide pour obtenir une réduction des émissions de CO2 des bâtiments chauffés collectivement, sans être préjudiciable à des travaux ultérieurs de réduction des besoins (isolation), est d’avoir une approche pragmatique et non dogmatique comme le serait celle de l’électrification massive.

D’ailleurs, le récent scénario livré récemment par RTE montre bien que, d’une part, il sera difficile de convertir la totalité du parc raccordé au gaz vers l’électricité, et que, d’autre part, cela présentera un intérêt dans la gestion de la flexibilité du réseau.

Pourquoi le bois ou les PACs électriques sont difficilement envisageables ?

  • La mise en place d’une chaudière collective au bois ne peut s’envisager que dans des situations bien particulières (disposition d’un local de stockage de pellets, possibilité de réutiliser le conduit de fumée existant, zone géographique disposant de ressources en bois…).
  • En ce qui concerne les PACs collectives, d’une part, l’offre disponible est limitée sur ce marché et d’autre part, l’installation s’avère souvent complexe et couteuse avec des performances limitées :
  • Emplacement de l’unité extérieure pour éviter les nuisances sonores et les problèmes de voisinage, obligeant parfois à installer cette unité en toit terrasse pour une chaufferie en sous-sol
  • Le niveau élevé de température de distribution de l’eau de chauffage (du fait de l’âge des bâtiments et la conception de l’installation) conduit à des performances limitées de la PAC

[1] Nous souhaitons aussi attirer votre attention sur la problématique du remplacement des 3 millions de chaudières individuelles gaz anciennes en copropriété qui mériterait selon nous, la réalisation d’une autre mission

[2] Concernant l’Eau Chaude Sanitaire (ECS), second poste de consommation de l’immeuble, 2 solutions sont possibles dans une chaufferie au gaz :

  • Produire et stocker dans des ballons l’ECS directement via la(les) chaudière(s) THP
  • Opter pour une solution associant un ou plusieurs chauffe-eau thermodynamique(s). Ces derniers peuvent éventuellement être couplé(s) à la production de chauffage via une régulation, permettant en particulier de les faire fonctionner sur des plages de températures où ils sont les plus efficaces, et ainsi de réduire le volume (et donc les pertes) de stockage du(des) ballon(s).