3 questions à Sylvain Waserman, Président Directeur Général de l’ADEME
Publié leAprès avoir entrepris un Tour de France des Régions depuis sa nomination à la tête de l’ADEME le 13 juillet 2023, Sylvain Waserman a accepté de répondre aux questions de Coénove pour partager sa vision des enjeux énergétiques du pays.
En tant que nouveau Président Directeur Général de l’ADEME, pourriez-vous nous présenter votre parcours et vos ambitions dans le cadre de cette nouvelle mission ?
J’ai un parcours d’élu et de chef d’entreprise. J’ai dirigé pendant 8 ans une société d’économie mixte spécialisée dans l’énergie, Gaz de Strasbourg. À mon arrivée, l’entreprise faisait du gaz naturel depuis 150 ans. A mon départ, elle réalisait 30 % de son chiffre d’affaires dans les réseaux de chaleur, et était devenu un acteur engagé de la transition énergétique de son territoire. J’ai par ailleurs été maire de village, président de Communauté de communes et élu régional. Ces expériences, aussi bien dans l’entreprise que dans la vie publique, m’ont modelé et m’ont fait prendre conscience de l’importance de la dimension territoriale dans la mise en œuvre des politiques publiques.
J’ai pris mes fonctions à la tête de l’ADEME dans un contexte particulièrement stimulant. L’éveil des consciences face à l’impératif de la transition écologique est une réalité : plus de 80% des Français reconnaissent que le dérèglement climatique est lié à l’activité humaine. La question centrale, aujourd’hui, c’est le passage à l’acte. L’ADEME est un très bel outil d’expertise et d’accompagnement des acteurs pour accélérer la transition énergétique et écologique dans les territoires et je suis très fier et honoré de la mission qui m’a été confiée.
Depuis votre prise de fonction, vous avez entrepris un Tour de France des Régions. Quels enseignements tirez-vous de ces rencontres et quel rôle l’ADEME peut et doit jouer dans les années à venir?
Mon tour de France des équipes et partenaires de l’ADEME m’a permis de dégager six axes de travail, que j’ai soumis aux équipes de l’Agence et elles m’ont fait remonter plus de 500 idées d’actions ! Le premier concerne la modélisation de nos ressources humaines, un point essentiel pour nous, pour mieux les piloter. Le second porte sur la mesure de l’impact de nos actions, avec en ligne de mire l’efficacité carbone de l’euro investi. Un 3e axe clé est la généralisation massive des solutions de transition écologique. Dans le cadre du budget prévisionnel pour 2024, l’ADEME bénéficie de moyens inédits, 4,2 Md€, pour accélérer la diffusion des solutions qui ont fait leur preuve pour décarboner l’économie, préserver les ressources et, réduire les pollutions. Le quatrième axe identifié concerne les valeurs que partagent chacun des salariés de l’Agence et qui fondent leur engagement.
Un autre chantier majeur de l’Ademe est sa capacité à mobiliser les citoyens, les entreprises et les élus. Nous sommes conscients que la transition écologique, c’est complexe et qu’il faut du temps pour se l’approprier, à nous de fournir les outils et les clés pour passer à l’action.
Enfin, un autre chantier important concerne la prospective. Comment garder un temps d’avance pour éclairer les enjeux, et notamment la façon dont l’intelligence artificielle et le numérique peuvent aider à la transition écologique (jusque-là, nous avions travaillé sur l’IA responsable et le numérique responsable) ?
Quel regard portez-vous sur la place des gaz verts dans la transition énergétique et particulièrement pour la décarbonation des bâtiments ?
La neutralité carbone passe par une réduction drastique des énergies fossiles, ce qui implique de conjuguer politiques de sobriété, d’efficacité énergétique et des alternatives avec les énergies renouvelables et de récupération. La décarbonation du gaz par la production de gaz vert est un défi mais présente aussi un important potentiel. On sait que la production ne pourra pas couvrir tous les usages, de la mobilité au chauffage en passant par les usages industriels, il faut donc définir ce que nous voulons faire de ces gaz verts.
Pour ce qui est des bâtiments, les situations sont diverses. Par exemple, dans les logements collectifs équipés de chauffage individuel, les solutions alternatives au chauffage au gaz sont encore peu matures pour des questions de coûts, d’encombrement et de faisabilité technique. Dans ce contexte, il est impératif de décarboner le gaz, pour continuer à alimenter ces logements, tout en réduisant leur consommation globale, mais d’autres usages du biogaz sont aussi attendus en mobilité ou dans l’industrie. La question qui se pose aujourd’hui, pour le gaz vert et la biomasse en général, c’est de gérer les ressources et de faire le choix des meilleurs usages. C’est le défi qui se pose à nous !
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